A un petit kilomètre du temple des chauves-souris, le marché flottant de Bangkla est l’une de nos destinations favorites pour le déjeuner. On y mange bien, varié, et pour tous les goûts. Même les garçons sautent de joie à la perspective de ce festin, pourtant sans frites, ni ketchup.
Un marché vivant et fourmillant
Nous y voilà! Malgré la période de deuil du premier anniversaire de la mort du Roi Bhumibol, la foule se presse toujours en direction du petit marché. Les vieilles rues de Bangkla sont étroites, sinueuses, et pas très adaptées à drainer de tels flux de visiteurs. Voitures et piétons coexistent tant bien que mal et occupent jusqu’au plus petit espace disponible. On se gare comme on peut, entre un temple, un commissariat et les pompiers.
Cinq ou six larges pontons ont été arrimés le long de la rivière Bang Pakong. C’est le corps principal du marché. Sur les côtés, des stalles de nourritures offrent des centaines de possibilités alléchantes. On flâne en glanant son repas, à coup de petites barquettes de délices variés. Autour de la plate-forme, quelques échoppes sur des barques de bois, suivant l’organisation traditionnelles des marchés flottants de Thaïlande. Une vieille dame prépare un Pad Thaï sur un réchaud à gaz, à même l’embarcation, dans un espace minuscule. Quelle organisation et quelle adresse!
Difficile de choisir entre tant de délices…
En plat de résistance, ma préférence ira, comme toujours, au poisson grillé en croûte de sel, le Pla Pao. Généreusement fourré de citronnelle et de feuilles de kafir, il est servi entier, dans une grande assiette à partager avec la tablée. On découpe une ouverture dans l’un des flancs et chacun se sert, à même la bête. La chair prélevée se consommera en sandwich, dans une feuille de salade ou de chou cru, avec quelques nouilles de riz et une sauce délicieusement épicée et citronnée.
Les enfants adorent ce poisson. Mais pour rien au monde, ils ne renonceraient non plus au Moo Ping, ces brochettes de porc sucrées qui se consomment avec du riz gluant. A la thaï, les garçons extraient le riz avec les doigts et le roulent en boulettes avant de le manger. Ils font toujours sensation auprès des locaux. Clairement, ils sont la bonne technique, et ce n’est pas courant pour des petits gars à la chevelure dorée!
Papa-Tout-Terrain, quant à lui, aime, par-dessus tout, la diversité des plats. D’abord un Pad Thaï, ces nouilles sautées et légèrement sucrées, assaisonnées de cacahuètes hachées. Celui du marché de Bangkla est fondant et moelleux. Et a un goût incomparable. Il y ajoutera quelques raviolis vapeur aux verdures variées, de petites aumônières frites, et bien sûr, une traditionnelle et indispensable salade de papaye (le fameux Som Tam)!
Pour peu qu’on sache la commander à son goût, la salade de papaye est un délice. Elle est fraiche et parfumée, avec un équilibre parfait entre le sucre et l’acidité. Trop pimentée en revanche, elle devient vite immangeable pour nos papilles occidentales faiblardes.
L’inégalable salade de papaye
Le secret d’une bonne salade de papaye, pour nous, consistera donc à la commander mai ped (littéralement « sans épices », mais le vendeur en mettra quand même… il faut rester humain…)… et, surtout, à bien, très bien surveiller sa réalisation.
Parce que dans certaines régions rurales, « mai ped » sera compris par « Seulement cinq ou six piments oiseau aujourd’hui, je sens que j’ai l’estomac fragile… » Mais mon estomac, avec seulement cinq ou six piments, il crie pitié, arrêtez, achevez-moi qu’on en finisse. Et la brûlure indienne, à côté c’est de la gnognotte. Bref, pour nous l’idéal, c’est un piment. Voire deux les jours fastes. Alors il faut bien la surveiller, la dame de la salade.
La confection d’une salade de papaye est, quoi qu’il en soit, très intéressante à observer. Elle se fait dans un grand mortier traditionnel de pierre ou de terre. On commence par les piments. (C’est un peu le centre de la recette). On écrabouille. Puis une poignée de gousses d’ail, qu’on écrabouille encore. (Ca manquait de goût avec juste le piment, il faut bien relever tout ça). Puis une tomate coupée en deux, des crevettes séchées, du sucre, des tas de sauces sucrées, acides, salées, et de la bave de crapaud. Ah non, zut, pas de bave de crapaud, ça c’est pour la potion magique. A la fin seulement arrive la papaye râpée, parfois un peu de carotte, et des cacahuètes.
Ce n’est sûrement pas le moment de baisser la garde cela dit! Il arrive que discretos, on nous balance par-dessus le tout des demis crabes crus, coupés en deux, et macérés dans une sauce marronnâtre. Ca a un goût fort poissonneux, mais c’est surtout si peu ragoutant que ça me gâche toujours mes salades! A bon entendeur…
A table, en plein marché flottant de Bangkla
Nous jouons ensuite des coudes pour trouver une grande table de bois sur laquelle nous nous installerons. Aux jours de grande affluence, il n’est pas rare, même, de la partager avec d’autres gourmands. Dans la mesure du possible nous évitons cependant, eu égard a nos enfants, d’une adresse encore relative. Dans ces cas-la, nous tremblons alors du début à la fin du repas, à l’idée d’une projection de sauce inopinée, ou qui sait, pire peut-être…
Nous sommes chanceux cette fois-ci. Nous aurons une table pour nous tout seuls. Au cours de leurs achats, il n’est pas rare cependant que des badauds s’arrêtent pour observer les enfants ou échanger trois mots avec nous. Ces jours-cis, avec l’anniversaire de la mort du Roi Bhumibol, tout le monde est vêtu de noir. Mais cela ne retire rien à l’atmosphère gaie et chaleureuse, à l’agitation réjouie des gourmands, venus se régaler en famille ou entre amis.
A peine deux minutes plus tard, nous remercions chaleureusement le destin de nous avoir trouvé une table pour nous seuls, quand Petit-Deux s’étouffe bruyamment en buvant son thé de chrysanthème. (Oui oui de chrysanthème.) (C’est très bon.)
On passe au dessert!
Sitôt terminés les mets principaux, nous repartons en quête d’un dessert traditionnel. La plupart d’entre eux sont à base de noix de coco.
La préférence de Petit-Un ira au riz gluant au lait de coco et au sucre de palme. L’un des plus grands classiques de Thaïlande. Papa-Tout-Terrain, lui, affectionne particulièrement de petits raviolis colorés, fourrés de chair de coco. Pour ma part, j’ai une nette prédilection pour ces feuilles de palme, fourrées de pâte de haricots rouge sucrée, au lait et à la chair de coco, puis grillées au barbecue pour en ressortir délicieusement caramélisées.
J’ai globalement un grand faible pour les desserts, quoi qu’il en soit… Peut-être me déciderai-je également pour une glace coco artisanale, en prétextant que je vais la partager avec Miss-Trois? Ou des petits flans en forme de demi-coque? Ou des jaunes d’œufs confits dans du jasmin, qui servent aussi souvent d’offrandes pour les dieux? Humm… J’adore les desserts d’ici! Il n’y a qu’a se laisser guider par leurs couleurs, leurs formes et leurs odeurs, toutes plus attrayantes les unes que les autres!
Il est déjà temps de partir. Parfois, quand le cœur nous en dit, nous concluons nos agapes par un petit tour en barque sur le fleuve, pour profiter du calme du Bang Pakong et admirer la succession de temples, sur les rives. Cette fois-ci nous partons directement… Nous voulons encore jeter un coup d’œil à quelques uns des merveilleux édifices religieux récemment poussés tout autour de Chachoengsao.
Le marché flottant de Bangkla en pratique
- Coordonnées GPS: 13.728542, 101.207544
- Ouvert le samedi et le dimanche de 9h à 16h environ. Si l’on arrive tard dans la journée, il restera bien moins de choix de nourritures.
- La plupart des plats coûtent entre 30 et 60 THB. Un poisson grille coûte entre 250 et 350 THB.